jeudi 31 octobre 2013

Reprises de positions - Tom Nisse (7/9)

La poésie est ensuite aussi la réserve naturelle de la parole, de l’espèce langage en péril. En effet, dans un contexte où les médias de masse, les discours politiques abrutis et dangereux, ainsi que la publicité ont le monopole du langage et tentent de le transformer en marchandise jetable parmi les autres, de le rendre inoffensif, il est à certains d’entre nous d’une nécessité limpide de tenter de participer à sauvegarder, ou dans le cas échéant de réhabiliter, d’un côté son potentiel de pensée critique et autonome, de l’autre sa part de virtuosité consistant à plonger dans le sublime. Qu’a-t-on à opposer aux médias de masse qui sont les véhicules des calomnies langagières politiciennes et des divertissements spectaculaires infantilisants qui exhortent la sclérose grandissante de la pensée de la foule ? Quant aux discours politiques, après dissection on ne peut que constater qu’ils sont dépourvus d’analyses véritables ainsi que de toute empathie, fondés sur des idéologies grabataires qu’ils tiennent à maintenir en vie à tout prix, et ce à tout prix fonctionne par l’écartement des vérités, par l’obscurantisme, par la manipulation falsificatrice du tangible, par la pratique et le montage du mensonge. A cette entreprise courante la poésie oppose sa capacité à trouver et à offrir des bribes de vérités, bribes coulées en œuvre d’art. Ces bribes de vérités sont ennemies intègres de tout dogme qui prétend détenir une quelconque vérité absolue. La vérité absolue n’existe pas, les vérités existent et sont changeantes parce que la réalité elle aussi est sans cesse mouvante. Autre particularité du discours politique est que, pour maintenir son cap, pour parvenir à ses fins égocentriques, il se fait lui-même façonneur de langage, de néologismes et d’expressions toutes faites ; avec des termes comme « discrimination positive » ou « frappes chirurgicales », il atteint des sommets acides de cynisme – et on constate que le langage répressif et militaire, truffé du zèle du langage managérial et couplé à des adoucissants ésotériques, se banalise un peu plus tous les jours. A cela la poésie oppose sa permanente agilité mutante qui est sémantiquement alerte de manière continuelle et détourne ou réutilise ces slogans officiels pour les épingler, les ridiculiser, dénoncer et anéantir. Aux imbécillités spectaculaires, de plus en plus appelées culture, la poésie oppose sa capacité à trouver et à offrir des voies de descente dans l’essence des sens, dans le sublime. Et puisque la sensibilité aussi se travaille, chacun pourrait, au fond de lui-même, s’y sentir là bien mieux que dans les vacarmes ambiants. Quant à la publicité, là aussi la poésie est antidote potentielle. Adrian Kasnitz, important poète et éditeur de Cologne, a très justement remarqué dans une conversation, que la publicité est, à son stade de vulgarité et de bêtise actuel, presque une aubaine pour la poésie. En effet, a-t-il poursuivi, un nombre croissant de quidams est, avec une dose de dégoût en croissance quasi équivalente, lassé de l’artillerie publicitaire et commence à chercher autre chose. La poésie, et en particulier parce que dans la majorité des cas poème elle est contenue dans une forme assez brève, est une réponse allègrement appropriée aux recherches de ces âmes fatiguées. Quant à la pratique de récupération, puis de transformation en marchandise, par le système dominant de tout ce qui pourrait lui être nuisible, le poème, tel que nous l’invoquons, lui échappera toujours. Notamment grâce à l’énergie de sa fragilité.

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mercredi 30 octobre 2013

Les secrets de la vie

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mardi 29 octobre 2013

Sombre Ducasse (version justifiée) 53

quoi de neuf à pataud-city le rock et
le roll sur le brouillard dégoulinant

tttchac ce jus de groseille fixant sa
chaussette droite dans le sous-sol de
la salle d'attente svp madame elle se
move s'écarte pour laisser le passage
au docteur Omnes ma foi on est choqué
anesthésié même mangeant dans ce plat
en étain à l'usage de l'écorché glacé

le squelette sapin de Noël perché sur
la table d'opération & le pataud père
du bedeau bouffant une salade pourrie

ce fidèle serviteur décédé à l'âge de
47 ans avec l'action catholique grise
générale des hommes énormes il avance
traverse les bois de p. city marchand
de savoir-saucisson qui contemple les
peupliers du haut de son vélo rose en
route pour le prosélytisme (idiotisme
épatant pour auteur de la capitale) à
cette femme mouillée double mouvement
onirique et évanescent jouent enfants
et douces fesses cuisses molles lampe
horloge maldive maladive endive l'eau
salée glougloutant sur le tas tout le
tas de pauvres ensevelis sous le caca
de surface bouillant d'insatisfaction

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lundi 28 octobre 2013

La limace à tête de chat (55)

La limace à tête de chat se sent pousser des ailes...
(peut-être en raison des compliments reçus de Mesdames Martine Sonnet et Mathilde Roux et de Monsieur Séné ; ce dessin leur est dédié.)

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samedi 26 octobre 2013

Le Train de Tarkos 57

Christophe Tarkos

Le Train (57)

Le train dans sa barque, tournicoti

Je ne m'attache pas aux feuilles attachées attachées comme le sont les rames des métros entre elles, les charmilles, les charmes, les chars, je ne me suis pas attaché, je ne m'attache pas, je ne me suis pas attaché au méli-mélo, je ne m'attache pas, je ne voyage pas en avion, j'ai mon fauteuil, je ne m'attache pas au fauteuil, à moi, à mon fauteuil, je ne suis pas collé comme le courant électrique.

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vendredi 25 octobre 2013

Poème ou papou

tôt ou tard
le bout t'aim' mon gars
tôt ou tard
l'atout s'barre
le gratin du bateau s'teinte au bout du mât
boul' qui t'abat le totem
où ta boue gâte le bagout de l'autel
le hangar où le loup joue et loue
la tôl' des morues
au ras de l'amour
au rat d'eau du gras tas de balourds
dedans la boue du patin de thème
de l'auto-topologique
car thot t'aim' debout
ou t'abat tôt le dard dur à boules

bout à bout
le tabou
le gâteau
t'aim' le brou
le tabac
les cadeaux
le tas d'boue tôt t'aime
ou du sale bout de ta gadoue
tagada
sème le larron
boute au gala le lardon
le trop de son bout à thème
la peau du boubou
au bout du tapis
tata gât' le tout du bas
d'où t'aime le tas qui boule
qui s'éboule en trop
au trot du ragoût de rat d'égout
qui déroul' son bas en bas
au thé-moutarde sur l'art

mais toto t'es mou
ta bouche chérie
me touche la mouche
par où t'aime l'état de butor
du moutard de l'aine

à tâtons
ton bouc tue le thon
ton tonton tiss' ton boubou
ton trois-quarts de bout
bout du mitron sur le tard
sur le totem où t'as bu au bar
tes bouts d'sous sur le compt'tare
tes compt's sous l'carbure
bouc de ta bure autour de tes mots
tels des embouts de sabots
au bec des aoûtats dans trop d'eau

t'aurais beau t'ôter
mêm' le goût du pot
mêm' la peau de crème
mêm' l'épée du loup
au lourd tabouret du cupidon
d'aine à la coupe au lait doux
qui bout à bout
se boute à tes mots
sans les poux mystiques
qui mastiquent ton appeau
aiment les mots dits
le premier pas pour en rire

bout à bout
le papou parie
bout à bout
le papa pourrit

bout d'abîme
le poèm' tarit
bout d'abysse
le poèt' tamise

le tabou t'habite
le totem t'entube
L. Suel (1989)

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jeudi 24 octobre 2013

Reprises de positions - Tom Nisse (6/9)

Voilà que nous sommes arrivés à l’image. « Quant à l’image poétique, c’est toujours un transfert de sens » a confié Frederico Garcia Lorca. Captation d’abord, transfert ensuite. De l’œil à la bouche. De la bouche à l’oreille. Et de l’œil à la main. De la main à la bouche. De la main à l’œil. De l’œil à l’œil finalement. Réalité perçue, captée par les sens, happée le plus intégralement possible, morcelée en images poétiques composant le poème, qui lui ensuite, par la voix ou la page, est proposé à l’autre, avec le potentiel d’agir sur les sens de cet autre. En diffusant les sens de ses propos. Aujourd’hui, grâce aux précurseurs qui ont ouvert les brèches, toutes les images de la réalité, réalité agissante dans laquelle le poème agit, sont prenables pour constituer l’image poétique. Le papillon et le plasma. Le pylône et la veine. Le torse nu et l’autobus vide. La couleuvre et le gratte-ciel. La fonte des pôles et l’odeur des draps. Le soupir et le soupirail. Le missile et l’iris. L’écran et la fenêtre. Ce qui permet à l’allégorie de désormais être digitale ou encore de rester tributaire du vent. Et « ne l’entendez-vous pas, ainsi raillent des protocoles de miel » (Monika Rinck). Les images, brutes ou ciselées, peuvent dès lors continuer à être exprimées en aperçu ou en fresque, en affirmation du soi ou en fiction, en fragment ou en épopée, du moment que leur construction est peaufinée avec pertinence. Et c’est précisément ici où la rigueur artistique intervient et où l’ego et le nombrilisme sont priés d’abdiquer. Intervention de style donc. L’image poétique réussie est un écho décalé de la réalité dont elle provient. Pour qu’elle soit réussie, il importe d’abord que son matériau de base soit cerné. Ensuite pétri. Ensuite l’assemblage du verbe exige une prudente extase. Une rage détaillée. Une implication tranchée, comme une colonne vertébrale en feu. Feu maîtrisé. Dans l’image poétique chaque mot est de façon rhizomique au service de chaque mot. Chaque couleur de vocable au service de l’ombre et de la lumière de l’image. L’inouï sera plus efficace s’il est discret. La complexité de la structure de l’image opérera favorablement si elle se pare de simplicité. La métaphore, pour atteindre juste, devra être dosée, comme si elle tombait naturellement sous le sens, comme imperceptible au premier abord. L’analogie, avec le même objectif, devra être motivée par la finesse et l’attitude dépouillée. Le jeu de mot, lui, devra servir, dans le meilleur des cas, à accentuer le propos, parfois aussi à entrainer la joie et à souligner la musique. Effectuer ce travail de construction d’images poétiques présuppose-t-il de penchants ? De sensibilité, de talent ? Soyons juste assurés du fait que la sensibilité et le talent se travaillent aussi. Le travail de construction d’images poétiques, par nature, est vraisemblablement proche de celui de l’alchimiste. Les données de base, c’est-à-dire la réalité et le langage qui la désigne, sont là, elles sont ensuite transformées de sorte à ce qu’on obtienne une entité constituée de vers (libres ou traditionnels, selon la situation de l’envie de celui qui écrit ; et qui ne devra jamais oublier l’envergure de la responsabilité qui lui incombe, parce que le vers est l’origine de toute la littérature), entité qui elle transporte l’altérité potentiellement signifiante pour celui qui veut bien la recevoir. Hors de l’ordinaire asphyxiant, ouverte vers le merveilleux envisageable et vers le dépassement évolutif. Une recette peut être la ténacité. Plus on crée plus on créera. Et surtout, plus on crée juste, plus on créera juste. Une autre recette, bien que, et c’est à déplorer, bien trop rare, est l’échange. (D’où peut-être le besoin de théoriser un peu.) Dans le choix de l’assemblage des mots qui formeront l’image poétique intervient l’expérience, certes, mais comme nous avons à faire à des transferts agissants, vivants et spontanés, interviennent aussi, sur le moment même, l’intuition et l’instinct. Eux deux vecteurs de plaisir artistique. Intuition et instinct, donc automatisme, écriture automatique. Mais, cet automatisme ne mène à bon port que grâce au travail effectué en amont et n’exclut pas de retravailler en aval – retravailler selon les mêmes principes d’automatisme d’ailleurs. Quand je dis écriture automatique, je ne me considère cependant aucunement comme post-surréaliste. La poésie était déjà écriture automatique avant que les surréalistes ne codifient le processus. La poésie est donc aussi travail de taupe dans les strates de l’histoire de l’art. Je respecte et connais passablement bien l’apport poétique des surréalistes, je tiens les différentes avant-gardes en très haute estime et m’inspire d’elles ; je suis un fier héritier partiel du Sturm und Drang, du romantisme, de l’expressionnisme, de dada, du surréalisme, du Grand Jeu, de Cobra, de la beat generation, du punk, et également de certains foudroyants francs-tireurs individualistes qui n’ont jamais appartenu à aucune école, à aucun mouvement défini ; ainsi que de certains remarquables élans politiques, l’anarchisme individualiste et l’Internationale Situationniste par exemple. J’explore aussi, avec joie récurrente, avec admiration souvent, les multiples approches poétiques non-occidentales. Mais je m’érige systématiquement en devoir de digérer ces influences, ce « modèle de travail pour la post-avantgarde » comme écrit la poétesse berlinoise Ann Cotten, et d’en forger ma propre voix, résolument inscrite dans notre époque, ou extraite de notre époque, dont elle est l’incomplet scribe. A cela s’ajoute que je ressens dans ces sphères de références une fraternité qui est bien plus qu’affective, et qui me tient très particulièrement à cœur, celle envers le surréalisme belge, notamment parce que le groupe surréaliste belge est encore bien vivant (bien que souvent discret, c’est son choix) et qu’il poursuit ses activités avec le génie qui a été le sien depuis ses débuts. Les esprits de Nougé et de Mariën veillent bel et bien.
Ensuite, je me considère, je me veux, après beaucoup de travaux de débroussaillage et beaucoup d’expérimentations préalables, éloigné de l’hermétisme opaque et de l’effet pour l’effet. Une des résultantes de cette volonté d’éloignement aux démarches des pratiquants de l’ultra-conceptuel, qui exaspèrent souvent considérablement, est un certain regain de réalisme. Pas un réalisme descriptif ou naturaliste, mais réalisme parce que compagnon de poésie intrinsèquement mêlée à la réalité perçue et vécue. Lâchage de meutes de rats experts en dynamite dans les soubassements des tours d’ivoire. A côté ensuite de ce souci de poésie que je me permets d’appeler pure, il y a la possibilité mise en acte d’écrire, de pratiquer, de chérir la performance poétique, la poésie sonore, et aussi le cut-up, le détournement, les proses poétiques, la prose politique, ainsi que la prose de proximité. Certains d’entre nous, considérant le tout comme un tout, et ils n’ont certainement pas tort, injectent aussi leur poésie dans des nouvelles et des romans. Et là-dedans il y a maintenant aussi cette voie d’écriture poétique déjà évoquée plus haut, qui défie toutes les catégories littéraires admises, qui ne saurait être classifiée en genre, et qui est tellement libre qu’elle ne supporte pas qu’on l’aborde à tort et à travers.

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mercredi 23 octobre 2013

Pas encore chaud

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mardi 22 octobre 2013

Sombre Ducasse (version justifiée) 52

les enfants cherchent une raison pour
leurs pleurs comme jadis ceux à qui a
tenu le poète un discours fleuve pour
grande personne les pleurs fleuve qui
s'échappe de leurs yeux rougis crevés

abstractions hideuses pour des larmes
de sel ardent fondu le rythme arraché
de bêtes de moteurs d'ailes d'oiseaux
pèse sur les doigts ta liberté compte
quinze moutons sur tes larges épaules
juchés il y a des silencessilencessss

il n'est pas un amuseur/bonimenteur à
vos dictionnaires pour WSB & vérifier
l'étymologie du verbe amuser amuser a
musée âme usée livres envahis par les
interférences-commentaires de texte y
parasitant l'essence il n'a rien rien
à dire à propos de lui il a démoli sa
platine stéréo pour se construire une
machine à rêver surmontée d'une boîte
de persil en poudre ajourée ça marche

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lundi 21 octobre 2013

La limace à tête de chat (54)

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samedi 19 octobre 2013

Le Train de Tarkos 56

Christophe Tarkos

Le Train (56)

Train-caquet, train-baquet. Le caquet du train. Le train caquette
Je ne venais pas, je ne vendais pas, je ne gagnais pas, je ne gagne pas, je n'ai pas tout dit, je n'aurais pas tout dit, je ne vends rien, je n'ai pas regagné la gare, je ne vais pas gagner, je n'ai pas dit mon dernier mot, je ne suis pas dans un sentiment, je ne vais pas m'ensevelir, je ne vais pas m'enterrer, je n'en ai pas eu le sentiment, je ne m'en souvenais pas, je ne suis pas entré.

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vendredi 18 octobre 2013

Anne Ansquer : Un pont de buis

Coupante
au-dessus du plat des pommes
à cuire
compote cannelle clou
de girofle
le soleil inondera

la radio avec du jazz assurément
les je t'aime ressérénant
les trombones pétant les jetés tout ensemble
les pluches, les bonheurs d'être,
-chaussures sages attendant légitimes, (dans) l'entrée

une veilleuse en abat-jour de soie plissée
barbarie repliée pour un temps
de sauvage,

ça sent chaud, l'intérieur
la chambre en robe, et, sous la contrainte
écrirai :

          Ce sera dur
          ce sera long
          ce sera loin

Les pommes cuisent, la musique ravelle
et bugle
les sourcils vont avec le jour c'est cela
un scandale

je les rejoins de tous mes pieds avec un ensemble pour cordes
au diable des sommeils
on se sent en sandales, tout sent bon
la Toussaints
où les morts oscillent, gaffent,

soucieux
des fleurs

merci

"Un pont de buis"-2010- "Repris" le 18/10/2012.
Anne Ansquer©

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jeudi 17 octobre 2013

Reprises de positions - Tom Nisse (5/9)

La poésie ensuite est aussi travail de construction, de structure et de style. De construction linguistique d’images qui rendent la réalité diffuse du monde compacte. De structure formelle méticuleuse qui a comme objectif évident d’être le soutien esthétique du propos ; c’est ici que les contraintes peuvent faire éclore des surplus de beauté et de poignantes scintillations de sens. Intervention de style. De construction rythmique et musicale également, ça va de soi. Concernant le rythme, concédons que la métrique est depuis plus de cent ans pour le moins informelle. Ce qui ne veut cependant pas dire du tout qu’il faut la négliger. Même si de nos jours ceux qui comptent les syllabes sont aussi rares que le trèfle est mauve, la métrique est inhérente au poème, qu’on le veuille ou non. Elle est son pouls. Si elle est absente, comme ça a par le passé intentionnellement pu être le cas dans certaines expérimentations poétiques, elle doit être remplacée par une unité stylistique appropriée (procédé sonore, ellipse, répétition ou autre) avec le tact clairvoyant qui s’impose alors. Si par contre elle est négligée ou traitée avec dédain, le poème est nul et non advenu. On ira donc, avec un soin et une attention extrêmes, la trouver dans la respiration, dans les césures voulues, dans la percussion des consonnes, dans le choix des vers longs ou courts et l’alternance ou l’absence d’alternance entre ceux-ci. Dans les astuces de la mise en page aussi. Dans le souffle de l’encre et dans le souffle du souffle. Il n’est ensuite absolument pas désuet d’avoir recours aux formes de versification classiques, ni à la rime précise, au contraire, cela peut s’avérer être une cogitation stimulante autant qu’un apprentissage décisif de rigueur. Si la métrique est le pouls du poème, la musique est l’articulation de sa portée dans l’espace. Le poème préfère ne pas être boiteux, le poème préfère toujours la danse, même, ou peut-être surtout, dans ses périodes les plus sombres. Parce que, plus la musique qu’il exhale sera intense, plus il s’ancrera. Et donc opérera. La palette des possibilités de composition musicale est sans conteste des plus larges. Depuis la modernité, des procédés tels la dissonance, la cassure, l’infraction ou encore le minimalisme, et son contraire, l’avalanche, ont prouvé leur indéniable (indéniable et offensive) faculté de déploiement de nouveaux spectres conquérants légués au poème. Néanmoins, il faut de nouveau rester vigilant, ce qui il y a quelques décennies était réussite effervescente, parce que participant à la fronde, doit aujourd’hui être manié avec la précaution appropriée. La poésie exècre la redondance. Elle charrie son histoire mais ne doit jamais s’immobiliser sur un quelconque acquis de celle-ci. Pourtant, elle la charrie son histoire, les techniques classiques d’obtention de musicalité restent valables et n’ont rien perdu en vigueur. L’allitération, par exemple, et ne prenons qu'elle comme exemple, mon intention n’étant pas de faire un traité de versification, demeure particulièrement envoûtante, si elle est manipulée avec tout le raffinement que son raffinement inhérent potentiel exige. La recherche de la mélodie a pu être, à travers les âges, une des obsessions principales de certains des meilleurs poètes. Chez d’autres, tout aussi marquants, mais animés par d’autres motivations, elle n’aura été qu’un moyen. Pour ma part, je dirai que c’est le lieu de matrice du poème qui décide de telle ou telle prépondérance. Quoi qu’il en soit, le rythme et la musique siègent indiscutablement parmi les fondements premiers de la poésie. Tentation de musicalité cohérente en symbiose avec les visées sémantiques de la parole, c’est ainsi que peut frapper le poème qui se respecte. J’affirme ensuite aussi que l’écriture poétique est écriture automatique, en effet le mot suivant vient bousculer le précédent, et l’image naît ainsi automatiquement.

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mercredi 16 octobre 2013

Exercice de veaucabulaire

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mardi 15 octobre 2013

Sombre Ducasse (version justifiée) 51

si sur un sol betteravier fraîchement
semé on pulvérise un peu de la poudre
Akdeniz (copyright C. Galata) eh bien
donc messieurs-dames voilà les jeunes
pousses par cet effet de euh mutation
quasiment pardon incroyable euh alors
euh métamorphosent une feuille simple
devient composée à plusieurs (douze à
quinze) folioles euh si carabinés euh
cannabinés euh imaginez les donc burp
conséquences de l'effet C. Galata sur
l'industrie sucrière oui l'saccharose
pardon maintenant enveloppé dans rose
du buvard rose euh quadrillé vraiment
coule pardon cool oui cool cool ô ô ô

ô ô ô ô vol de nuit en jaillissements
spermiques stéréoboscopiques monstres
en manteaux de fourrure les talismans
photojaunis de mère à la main face au
miroir (glaces dévorantes) parurepute
flottante les cheveux verdis poudreux
poudrulents se sont dressés lui s'est
enfui le chemin s'ouvrant derrière la
diapositive amateur ceci n'est pas de
la rigolade seul pour exister de tous
les hommes morts écrabouillés sous la
baignoire ne se logeant que comme des
palmipèdes d'une espèce rare pour lui
retrouver le verbe ironique devant ta
sainte face cherche et ne le retrouve
pas il ne sait plus attendre tous les
vêtements sombres sombrent tandis que
sonnent dans les broussailles oranges
l'armure des longues pattes araignées
tarentules et pourquoi pas centipèdes

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lundi 14 octobre 2013

La limace à tête de chat (53)

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samedi 12 octobre 2013

Le Train de Tarkos 55

Christophe Tarkos

Le Train (55)

Je ne pars pas, je ne suis pas parti, je ne me perds pas, je ne me suis pas semé, je ne sème, je ne sème jamais, je n'ai pas semé, je ne me suis semé, pourquoi me serais-je semé, quand aurais-je pu me semer, quand, en même temps, partant, m'emmener, m'accompagner et me semer et me perdre, je ne me suis pas semé. Je ne voudrais pas me semer me déplaçant.

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vendredi 11 octobre 2013

Ecoutervoirlire

La Nuit remue, 7ème édition, 15 juin 2013
Voir des extraits vidéos de toutes les prestations, écouter l’intégralité des interventions.
Lire le montage d’extraits de « D’azur et d’acier » que j’ai présenté ce soir-là.


Voir l’exposition de mes dessins à la Galerie éphémère dans la Grande Menuiserie de Nolwenn Euzen. Dessins idiots, portraits de Mauricette Beaussart et du Pérubu, illustrations pour Ichi Lau d’Ivar Ch’Vavar, etc…


Voir les photos de Josiane Suel et lire les poèmes de son mari dans la revue chos’e n° 5 « Les tombes » pages 52 à 59 
Et chez l’éditeur Publie.net « La poussière »

Lire le compte-rendu et voir les photos des Poétiques de Saumur (septembre 2013) sur le blog ex libris.  

Ecouter les participants à la conférence-débat « Traducteurs, vos papiers ! » animée par François Annycke et organisée à Lille avec La Contre allée. J’y parle de ma traduction du Livre des esquisses de Jack Kerouac et j’en lis des extraits. Voir aussi les photos de cette rencontre.

Dans le cadre d’une dissémination des traductions, lire mon poème en picard « Eszalo » et sa traduction en français sur le blog "Œuvres ouvertes" et voir les photos de L Margantin.

Lire sur le blog de la web-association des auteurs mes réponses aux questions de Laurent Margantin à propos de l’écriture sur le net 

Lire sur Le Blog Littéraire « Les interminables », poème en vers justifiés de Patrice Houzeau à partir d’un extrait d’un de mes poèmes paru dans Canal mémoire.

Lire « d’une rive à l’autre » poème à contraintes (double acrostiche et vers justifiés) sur « Pendant le weekend », le site de Pierre Cohen-Hadria (dans le cadre des Vases communicants)

Lire enfin ma nouvelle « Sombre rêve », écrite pour la série de Guénolé Boillot « Histoires anéanties ». 

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jeudi 10 octobre 2013

Reprises de positions - Tom Nisse (4/9)

Passons de la grande histoire au petit milieu. Il est tout aussi important pour moi, de la même manière que je me démarque (sans malveillance) du slam, de me démarquer de ce qu’il serait convenu d’appeler la vieille garde. Bien que dans chaque génération de protagonistes artistiques, (les poètes eux aussi sont protagonistes…) il y ait la minorité de ceux qui brillent plus fort que la nuit, avec leurs « lèvres de vitre » (Tom Gutt), et lesquels sont et restent admirables et sortiront toujours du lot, il y a tous les autres qui tiennent leur soi-disant notoriété (et qui souvent est basée sur une écriture consistant en de l’assemblage stérile d’images coupées de la réalité pulsante) pour grandeur acquise, qui se passent le sceptre entre eux, se félicitent mutuellement et sont hostiles à des voix divergentes, dangereusement novatrices, car qui sait, celles-ci pourraient les détrôner. Ils sont certes ouverts à certains plus ou moins jeunes qu’ils admettent dans leurs cercles et filiations, à condition que ceux-ci écrivent plus ou moins de la même manière qu’eux et qu’ils les considèrent comme maîtres jusqu’à ce que mort s’en suive. En d’autres termes, à condition qu’ils se soumettent. Ils sont ensuite plus ou moins ouverts à certains d’entre nous, quand ceux-là s’imposent parce que la valeur de leur travail poétique s’avère tout simplement indéniable. Souvent, ceux de ladite vieille garde sont aussi éditeurs ou critiques littéraires, ils étouffent donc plus la poésie qu’ils ne la soutiennent. Que ceux qui se sentent visés se sentent visés. J’écris ceci depuis le microcosme de la Belgique francophone (où il y a cependant eu l’exception, l’exact opposé, l’infatigable, magnifique et tant regretté Jacques Izoard), je ne suis pas sûr que dans d’autres contrées francophones la situation du milieu soit la même, mais j’ai cru humer que les différences ne sont pas criantes. Si pourtant il n’en était rien de cette suspicion, je ne pourrais que m’en féliciter. En tout cas, la situation est radicalement différente en Allemagne où les aînés encouragent avec enthousiasme les nouvelles voix foisonnantes, où la fraternité en poésie est palpable, où la critique littéraire est à l’affût, où les échanges sont solidaires et amicaux, avec leurs lacunes aussi bien sûr, mais ceci en dépit d’une multitude impressionnante d’approches dissemblables, toutes talentueuses, quelques-unes incontournables ; et où en conséquence les éditeurs sont généreux, les revues actives et courageuses bien que très exigeantes, les lecteurs et auditeurs nombreux. Ne serait-ce pas plutôt de la sorte qu’un authentique activisme poétique devrait être considéré et mis en œuvre ? Et non par des attitudes qui ressemblent étrangement à celles de politiciens qui louchent frénétiquement en direction du pouvoir.

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mercredi 9 octobre 2013

Notre jardin

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mardi 8 octobre 2013

Sombre Ducasse (version justifiée) 50

debout les morts de boue une dernière
nouvelle de pataugas-city nouvelle de
notre agence de l'attire-mante /cx/23
oï/ah/23/ faisant siennes les vues de
m. Mouzéro cf les économies d'énergie
réalisables rédacteur en chef dorg il
décide surseoir à fabrication journal
de papiers/ proximité future centrale
nucléaire mortelle infra-rouge située
gravelines/ moins de 50 km presses de
pataugas-city/ réacteur en chef assez
préoccupé par propre survie et sienne
famille de bouseux psychédéliques/ il
construit grande cave air-conditioned
sous collines d'artois calcaire /stop

les centrales mortelles & immortelles
infra-rouges finiront par inonder les
paysages de leurs rayons invisibles &
cependant dangereux (rien à voir avec
dor - radiation orgonomique de mort -
rom) certains seront à même de lancer
par pataugas-city d'ultimes nouvelles
au peuple des prévoyantes taupes avec
au magnétophone le mot de la fin pour
GC que dalle la fin du mot exégète de
WSB c'est con/troll petite photocopie
d'un voyage étrange à bien des égards
à l'écoute de radio-varsovie & on vit
sur une terre baby u can drive my car

à tout hasard écoutez une voix assène
y s'abat this is war to extermination
yes towers open fire open fire towers

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posted by Lucien Suel at 07:44 0 comments

lundi 7 octobre 2013

La limace à tête de chat (52)

Dessin réalisé "Maison Julien Gracq" à St Florent Le Vieil.

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posted by Lucien Suel at 07:49 3 comments

samedi 5 octobre 2013

Le Train de Tarkos 54

Christophe Tarkos

Le Train (54)

Le long train glisse, étoile brillante. Le mur long passe longtemps
Je n'en prends pas, je n'en ai jamais pris. Je pourrais encore entendre si l'idée m'en venait, si jamais l'idée venait, je ne l'enlèverais pas, je ne l'enfouirais pas, je ne la supprimerais pas, si jamais l'idée venait, je ne suis pas sourd, je la prendrais avec moi. Je ne suis pas en plein dans la lumière parce qu'exprès, je ne me suis pas mis du côté où il y a la lumière des rayons de soleil, je ne suis pas de la lumière, je suis consistant asséné atterré rasséréné entier content, je tiens de l'engeance. Noble et puant.

Traverse les montagnes au cœur des montagnes

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posted by Lucien Suel at 07:46 0 comments

vendredi 4 octobre 2013

Reprises de positions - Tom Nisse (3/9)

Pour
Nous l’avons dit, bien que nous soyons relativement jeunes, nous ne faisons pas de slam. Nous faisons de la poésie. Qui sommes-nous donc, poètes aujourd’hui, non pas poètes maudits mais poètes qui ont leur mot à dire, quel rôle certains d’entre nous estiment-ils pouvoir attribuer à la poésie ? Et, de surcroît, qu’avons-nous pu découvrir et réaliser à travers notre écriture et sa confrontation à différents publics depuis un certain nombre d’années, qu’est-ce qui affine et dynamise notre position et notre geste ?
D’abord, il est notablement important pour moi d’affirmer que le poète n’est pas seulement un type qui de temps en temps ou à longueur de journée note ses inspirations soudaines successives, à quoi, malheureusement, nombre de jeunes gens semblent restreindre l’image de la poésie actuellement. Ce qui traduit un manque flagrant de subtilité. J’affirme, et un peu rageusement, que la poésie est aussi un travail de réflexion. De pensée philosophique, politique, historique, artistique interdisciplinaire, de vision cheminant toujours, sans souffrir des limites mais soucieux de l’efficacité des contraintes choisies, vers le plus haut degré de lucidité quant à l’entourage immédiat ou mondial ; et cette pensée doit résolument tendre vers la liberté. Vers la liberté dans tous les domaines cités. Nous l’avons vu, la poésie retranscrit, ausculte puis sculpte verbalement le quotidien de différents cadres lesquels forment la réalité de nos sociétés. Leur réalité mentale et émotionnelle, mais aussi crûment prosaïquement politique. Une réalité régie. Par le pouvoir politique. En mouvement dans celle-ci, la poésie est action bien plus que contemplation ou inspiration subite. Elle est perception agissante remodelant dans des formes indépendantes la réalité perçue. Une réalité régie par les états et leurs lois, par les politiques économiques et ce qu’elles infligent à la terre, par des discours uniformisés et ce qu’ils infligent à la conscience et l’inconscience collective. Par la science et la technologie aussi, tous deux au service de ce pouvoir politique et économique. Pour voir véritablement, il faut s’écarter. Une poésie véritable s’écrit donc à la marge de la marche de l’histoire pour être apte à puiser dans celle-ci avec plus de justesse. Cette parfois nommée grande histoire, qui est la donneuse de directives à toutes les petites histoires, les individuelles, repues ou tragiques. Histoire régie par des pouvoirs politiques qu’André Blavier, dans un texte sur la peinture de Jane Graverol, résume ainsi : « le pouvoir déchu des "hiérarchies", dont l’histoire nous livre à cru saignant la dérisoire succession ». Contre le pouvoir ainsi identifié, ce pouvoir qui n’a d’autre but que lui-même et ses propres intérêts, et ce en poussant devant lui une charrette remplie de centaines de milliers de victimes, de mutilés, d’exploités, de refoulés, d’aliénés, en tapissant les parois de la charrette de cynisme, de falsification historique, de mensonge, de pathologies discursives et de paternalisme gluant, poussant cette charrette en direction d’un avenir qui se profile comme étant définitivement désastreux, le progrès et toutes les ruines et tous les squelettes désarticulés qu’il annonce – contre ce pouvoir, la poésie doit sans relâche affirmer la puissance. La puissance d’évocation, de création, de respiration, de rêve frontal, de mémoire, et même, quand nécessaire, et c’est le plus souvent le cas, de scandale linguistique et de recherches destructrices. Recherches qui aboutissent chez certains d’entre nous, ceux qui continuent à ne pas ignorer que la destruction est préambule au faire de la place pour du nouveau. Sous cet angle, qui est un angle indispensable, la poésie est action vitale et désespérée, action mise en paroles, paroles créatrices participant à une volonté de liberté continuelle, de manière allusive et directe à la fois, de par là même où elle est insoumission sémantique. Déverrouillage mental. Issu de voyance impliquée. Pour.

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posted by Lucien Suel at 14:37 0 comments

mardi 1 octobre 2013

Sombre Ducasse (version justifiée) 49

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posted by Lucien Suel at 07:32 2 comments