vendredi 31 décembre 2021

Venir au vent (XXI) par Laurent Margantin

 II

 

Et que sais-je de ce pays,

je n'ai pas encore vu

la montagne Sainte-Victoire

qui ne peut tout de même pas

n'être que cette image accrochée

aux devantures des boutiques de souvenirs

 

en ouvrant cette fenêtre

                   le feu un instant s'est rapproché

                               plus violent, plus vif

 

c'était mon regard tourné

                vers les faîtes argentés des peupliers

 

fenêtre :

des toits rouges et roses

le vent très léger

 

la clarté

du premier moment

vidé de tout mot

 

quand tremble encore le jour

et que la peau frissonne d'être effleurée

par l'air méditerranéen

 

je bouge,

j'écarte mes bras vers l'horizon

je fais un premier pas

hors du cercle fermé de la nuit

 

je suis silence

 

           j'apprends ferveur et clairvoyance

 

                               j'avance dans cet air fluide

dans ce blanc sans nom

 

                 je marche dans les rues silencieuses

 

(grands champs survolés par les corbeaux

leurs vols lourds le soir,

c'était il y a longtemps, dans les Vosges,

et je ne me souviens qu'à peine à présent

de ce jour sombre)

 

Laurent Margantin est un auteur et traducteur vivant à la Réunion. Ces poèmes vont paraître sous le titre Erres aux éditions Tarmac https://www.tarmaceditions.com/erres

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jeudi 30 décembre 2021

Poème express n° 905

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mercredi 29 décembre 2021

Le Sonnet (Le Bordel des Muses par Claude Le Petit)

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mardi 28 décembre 2021

Dans la foule par Piotr Aakoun et Lucien Suel - 6/10

 


Dans la foule. Grâce au téléobjectif, le reporter photographe des médias sacrés parvient à isoler le visage du Comte Dracula. Une traînée de sang séché divise l’espace en deux hémisphères. Les géographes du Ministère de Salubrité Mentale s’interrogent devant les viscères des oracles sacrifiés pour le bien commun.

 48 mots pour 10 dessins de Piotr Aakoun

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lundi 27 décembre 2021

Poème express n° 904

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vendredi 24 décembre 2021

Venir au vent (XX) par Laurent Margantin

I

 

Dehors, derrière les volets fermés,

dans l'air encore frais de l'aurore,

fusent leurs premiers cris

 

un sifflement sec et venu de loin

traverse la rue qu'on lave à grands jets d'eau,

un léger vent amène

le froissement doux des feuilles des peupliers

pris eux aussi dans la danse qui commence

 

encore allongé,

j'écoute, les yeux fermés,

sentant déjà l'odeur du jour

qui entre dans la chambre par la fenêtre ouverte,

imaginant à travers elle

ce monde inconnu de la première aube

première aube,

liberté du devenir

suivant dans l'ombre de la chambre

l'essor d'un nouveau cri échappé,

le mouvement des ailes qui frôlent les murs

 

Aix-en-Provence,

nom murmuré pour soi

et qui ne veut rien dire,

situé à l'intersection de tous les lieux

connus et ignorés

 

souvenirs confus des errances passées,

vertige du vol à venir

 

premier oiseau inconnu

et dont le nom sonne

comme un joyeux coup de fouet

 

j'ai ouvert les volets

 

                                                                   les bras tremblant presque

                                                         de m'être penché au-dessus du vide

 

ce jour qui commence

est comme un feu qui se propage

dans toutes les directions

 

Laurent Margantin est un auteur et traducteur vivant à la Réunion. Ces poèmes vont paraître sous le titre Erres aux éditions Tarmac https://www.tarmaceditions.com/erres

 

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jeudi 23 décembre 2021

Poème express n° 903

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mercredi 22 décembre 2021

Le Sonnet (sur Paris par Paul Scarron)

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mardi 21 décembre 2021

El Desdichado - remix

 El Telostichado

Je suis le ténébreux, le veuf seul en ce bourg,
Le prince d'Aquitaine à la tour qu'on foudroie.
Ma seule étoile est morte, et mon joli tambour
Porte le soleil noir qu'un esprit chagrin loua.

Dans la nuit du tombeau, toi qui vins alentour,
Rends-moi le Pausilippe et le lac jamais froid,
La fleur qui plaisait tant à mon être si lourd
Et la treille où le pampre en roses se déploie.

Suis-je Amour ou Phébus ? Lusignan ou Chassain?
Mon front est rouge encor d'un baiser engrangé,
J'ai rêvé dans la grotte où baigne un étranger.

Et j'ai deux fois vainqueur renversé Edouard V
Modulant tour à tour "tea for two, two for tea",
Les soupirs de la sainte et les cris du gentil.


La dernière lettre de chaque vers forme verticalement le nom "Gérard de Nerval" (télostiche). Les vers ont tous la même longueur, afin que ces lettres soient directement alignées.

L'ordre des rimes est le même que dans "El Desdichado".

 

 

 

 

 

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lundi 20 décembre 2021

Poème express n° 902

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vendredi 17 décembre 2021

Venir au vent (XIX) par Laurent Margantin

 sites & horizons

L'intérieur des terres

 

(Vosges)

 

La route monte dans la lumière,

la lumière se perd dans la brume

 

plus haut, sur un autre versant,

la roche griffe les épaisses sapinières

 

sur le bord de la route la pierre noire ruisselle,

ouvre une arche béant sur le ciel et le peu de clarté :

un nom, un nom cassant

pour ce sommet sauvage et gris

Hohnek

nom un instant suspendu

au-dessus de tous les noms,

 

(Cucuruzzu, en Corse)

 

terre sombre, terre noire,

 

formant des escaliers naturels

les racines nous guident dans un dédale de branches,

 

ça et là des rocs humides,

 

(tout à l'heure, montant vers les pointes de Bavella,

nous avons dû rebrousser chemin,

la route et le sommet

restant perdus dans le brouillard,

et l'averse tombant sur nous

brusquement depuis les hauteurs)

 

blocs ovales couchés au milieu de la forêt,

figures d'un monde au silence concentré et ferme,

 

et plus loin, cette clairière, forteresse rocheuse

au-dessus des vallées vertes profondes,

un site à la fois chaotique et organisé,

humain et chtonien, centre inconnu du pays,

 

(Vosges)

 

champs labourés et noirs

 

au cœur de l'hiver, une troupe de corbeaux

se rassemble le soir venu sur la colline en face

 

emplissant le ciel déchiré le crépuscule rouge

 

plus bas, je me perds dans ce bois silencieux,

la lumière étouffée par les branches des sapins

 

marche lente et hésitante

dans cette galerie sombre,

 

les aiguilles sur le sol

noires, brunes, un peu mauves,

composant un alphabet indéchiffrable.

 

 

Inselberg

(Tùbingen)

 

 

Écrire Inselberg, sombre mont

peuplé d'ombres, comme ces tailleurs de pierre

 

nuages dérivant vers l'est, averse

 

cachés au milieu de la forêt

gargouilles sortant de terre,

et la route vers le cimetière, et

la beauté froide des arbres dépouillés (balafres)

(chercher inconsciemment les liens

entre les données brutes des lieux) (signes),

telles ces pierres tombales

 

autres stèles, des troncs coupés

 

entassées là au milieu des herbes, et

non loin de là les rebuts de pierre, de bois

(on cherche à lire noms et dates sur le marbre noir),

 

plus haut un sentier partant dans la forêt,

des pins effondrés, rompus par la tempête

(l'un cassé, l'autre penché

et soutenu par des branches),

amas de pierres noires cassées

(jetées? déjà travaillées?),

curieuse harmonie de vie et de mort,

 

- plus loin, plus bas, dans une cour (balafres),

un homme taille dans le bois

des géants aux têtes carrées et grotesques

un peu levées vers le ciel, qu'il peint ensuite,

derrière lui les troncs entassés, échoués,

 

- toutefois, reprendre la route en sens inverse,

racines, des formes se lient,

ce qui est gravé ou taillé parle ensemble

invisiblement (incises, déchets),

retrouve aussi la croissance des fibres,

détritus végétaux partout dans la forêt de février,

puissantes couleurs, lenteur inhérente aux gestes,

échanges de forces, fruits et graines séchées,

gravats, glace couvrant la route,

au-dessus le vol d'une buse et son cri,

ignorant le travail chtonien,

ici quelqu'un trace toujours, incise, casse, grave

(nombreuses balafres sur les troncs).

 

Laurent Margantin est un auteur et traducteur vivant à la Réunion. Il a publié plusieurs récits (Aux îles Kerguelen, Le Chenil, Roman national) aux éditions Œuvres ouvertes et des poèmes dans plusieurs revues. Il travaille depuis plusieurs années à une édition critique du Journal de Kafka accessible en ligne (www.journalkafka.com). Dernière publication : Les Carnets du nouveau jour /3 (éditions Œuvres ouvertes)

 

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