Germain Nouveau (1851-1920)
Germain Nouveau, poète de l’amour, vagabond et mystique. (extrait)
Depuis longtemps, Germain Nouveau est dans mes pensées. D’abord à cause de son œuvre poétique publiée après sa mort, ces deux livres majeurs que sont La doctrine de l’amour et Les Valentines. Ensuite, en raison des péripéties de sa vie, de son amitié avec Arthur Rimbaud et Paul Verlaine. Germain Nouveau est aussi pour moi une figure du vagabond solitaire, un ancêtre de ces beatniks découverts dans les livres de Jack Kerouac. J’ajoute que Germain Nouveau termina son existence dans l’imitation de Benoît-Joseph Labre, le saint pouilleux qui fréquenta jadis l’église de mon village. Ce qui m’amène à une autre approche, psycho-géographique pourrait-on dire ; sentir ce que lui, homme du Midi, vécut dans cet Artois où j’habite, notamment avec Verlaine à Arras, la ville de Jean Bodel et Baude Fastoul, les poètes lépreux du Moyen-âge, la ville aussi où naquit Pierre-Jean Jouve.
Le beffroi d’Arras se redresse
Comme la hune au vent d’hiver ;
Mais Marseille ! est une bougresse,
Qui tempête, au bord de la mer ;
Et puis tout naturellement, ce lien, quasiment une communion, qui existe entre les poètes à travers le temps, à travers l’espace, un lien qui se matérialise dans les anthologies.
J’ai lu pour la première fois le nom de Germain Nouveau dans L’Anthologie de l’humour noir d’André Breton, un livre de poche acheté dans une librairie d’Arras où j’étais pensionnaire en classe de seconde. Ensuite, j’ai trouvé le volume Germain Nouveau dans la collection "Poètes d’Aujourd’hui" de Pierre Seghers et enfin ses deux livres principaux La Doctrine de l’amour et Les Valentines publiés ensemble dans la collection "Poésie" de Gallimard.
J’ai d’emblée, été touché par cette poésie narrative et l’importance accordée à l’amour sous toutes ses formes.
Amour qui pleures sur les brandes
Avec l’angélus du matin,
Sur les steppes et sur les landes
Et sur les polders des Hollandes ;
J’étais sensible à ce mélange entre religiosité et érotisme que je voyais chez un Verlaine mystique et lubrique, ou plus tard, chez d’autres auteurs qui furent parfois tentés par la prêtrise, Bataille, Klossowski, Louis-Combet. Germain Nouveau, perméable à toute influence, trouve dans sa production littéraire, l’unité de sa personne, une quête de soi à travers le grave et le futile, doctrine et valentine.
Plus tard, Germain Nouveau prendra le parti de la Pauvreté, celle de la première béatitude « Bienheureux les pauvres en esprit... ». Béatitude, une des origines du mot beat. « Être pauvre d’esprit, c’est être libre. »
La mauvaise richesse, elle est dans notre sang !
Elle est dans nos pourpoints, elle est dans notre code
Et fait l’opinion, comme elle fait la mode.
Au long de sa vie, le poète a traversé, contemplé les paysages de mon enfance, voyagé sous les mêmes nuages que Vincent Van Gogh, du Nord au Sud, du Sud au Nord, traversé les mêmes rivières, l’Escaut, la Scarpe, la Lys. Il parle à Jean Richepin « des nords de France d’une saveur inattendue », il parle du faro, une bière bruxelloise, il parle de l’absinthe beurrée, mélange d’absinthe et de bière, il parle du genièvre. Plus tard, lors de ses voyages en Angleterre avec Rimbaud, puis Verlaine, il goûtera dans les pubs, les fish and chips arrosés de gingerbeer.
Me touchent aussi, malgré ces incessants voyages, l’importance qu’il accorde à son village natal, le fait qu’il ait comme moi le jardin et la maison comme points d’ancrage. Et puis, de façon un peu bête, je remarque ces détails, petits signes, que Nouveau meurt en 1920, l’année de naissance de mon père et de Charles Bukowski... et au trio Rimbaud, Verlaine, Nouveau, j’associe très naturellement le trio Kerouac, Ginsberg, Burroughs...
Depuis longtemps, Germain Nouveau est dans mes pensées. D’abord à cause de son œuvre poétique publiée après sa mort, ces deux livres majeurs que sont La doctrine de l’amour et Les Valentines. Ensuite, en raison des péripéties de sa vie, de son amitié avec Arthur Rimbaud et Paul Verlaine. Germain Nouveau est aussi pour moi une figure du vagabond solitaire, un ancêtre de ces beatniks découverts dans les livres de Jack Kerouac. J’ajoute que Germain Nouveau termina son existence dans l’imitation de Benoît-Joseph Labre, le saint pouilleux qui fréquenta jadis l’église de mon village. Ce qui m’amène à une autre approche, psycho-géographique pourrait-on dire ; sentir ce que lui, homme du Midi, vécut dans cet Artois où j’habite, notamment avec Verlaine à Arras, la ville de Jean Bodel et Baude Fastoul, les poètes lépreux du Moyen-âge, la ville aussi où naquit Pierre-Jean Jouve.
Le beffroi d’Arras se redresse
Comme la hune au vent d’hiver ;
Mais Marseille ! est une bougresse,
Qui tempête, au bord de la mer ;
Et puis tout naturellement, ce lien, quasiment une communion, qui existe entre les poètes à travers le temps, à travers l’espace, un lien qui se matérialise dans les anthologies.
J’ai lu pour la première fois le nom de Germain Nouveau dans L’Anthologie de l’humour noir d’André Breton, un livre de poche acheté dans une librairie d’Arras où j’étais pensionnaire en classe de seconde. Ensuite, j’ai trouvé le volume Germain Nouveau dans la collection "Poètes d’Aujourd’hui" de Pierre Seghers et enfin ses deux livres principaux La Doctrine de l’amour et Les Valentines publiés ensemble dans la collection "Poésie" de Gallimard.
J’ai d’emblée, été touché par cette poésie narrative et l’importance accordée à l’amour sous toutes ses formes.
Amour qui pleures sur les brandes
Avec l’angélus du matin,
Sur les steppes et sur les landes
Et sur les polders des Hollandes ;
J’étais sensible à ce mélange entre religiosité et érotisme que je voyais chez un Verlaine mystique et lubrique, ou plus tard, chez d’autres auteurs qui furent parfois tentés par la prêtrise, Bataille, Klossowski, Louis-Combet. Germain Nouveau, perméable à toute influence, trouve dans sa production littéraire, l’unité de sa personne, une quête de soi à travers le grave et le futile, doctrine et valentine.
Plus tard, Germain Nouveau prendra le parti de la Pauvreté, celle de la première béatitude « Bienheureux les pauvres en esprit... ». Béatitude, une des origines du mot beat. « Être pauvre d’esprit, c’est être libre. »
La mauvaise richesse, elle est dans notre sang !
Elle est dans nos pourpoints, elle est dans notre code
Et fait l’opinion, comme elle fait la mode.
Au long de sa vie, le poète a traversé, contemplé les paysages de mon enfance, voyagé sous les mêmes nuages que Vincent Van Gogh, du Nord au Sud, du Sud au Nord, traversé les mêmes rivières, l’Escaut, la Scarpe, la Lys. Il parle à Jean Richepin « des nords de France d’une saveur inattendue », il parle du faro, une bière bruxelloise, il parle de l’absinthe beurrée, mélange d’absinthe et de bière, il parle du genièvre. Plus tard, lors de ses voyages en Angleterre avec Rimbaud, puis Verlaine, il goûtera dans les pubs, les fish and chips arrosés de gingerbeer.
Me touchent aussi, malgré ces incessants voyages, l’importance qu’il accorde à son village natal, le fait qu’il ait comme moi le jardin et la maison comme points d’ancrage. Et puis, de façon un peu bête, je remarque ces détails, petits signes, que Nouveau meurt en 1920, l’année de naissance de mon père et de Charles Bukowski... et au trio Rimbaud, Verlaine, Nouveau, j’associe très naturellement le trio Kerouac, Ginsberg, Burroughs...
à suivre...
dans la Revue des Deux Mondes, le numéro qui vient de paraître (mai 2008) .
Libellés : Beat, Benoît Labre, Bukowski, Germain Nouveau, Kerouac, Lucien Suel, Poésie