vendredi 29 octobre 2021

Venir au vent (XII) par Laurent Margantin

vers le spitzberg
 
notations-respirations
 

 I

 

Cette rangée d'arbres

en hiver

et la lumière

 

aube ou crépuscule

vivant entre

vision et souvenir

 

mont ou colline ?

les mots ne disent

pas ce paysage

 

à la fenêtre

une seule ligne

obscure et lumineuse

 

des vignes rousses

des branches noires

des maisons blanches

 

tout droits et nus

et noirs

et ce rouge qui monte

 

je marche encore

sur ces hauteurs

un jour clair d'été

 

la plaine en bas

que je parcours

ouverte à tous les vents

 

Spitzberg

curieux nom

pour une hauteur sans pointe

 

une étendue

un peu surélevée

et presque plane

 

une vue là-haut

sur le Jura souabe

toujours bleu

 

à cette fenêtre

encore une fois

de veille

 

 

Laurent Margantin est un auteur et traducteur vivant à la Réunion. Il a publié plusieurs récits (Aux îles Kerguelen, Le Chenil, Roman national) aux éditions Œuvres ouvertes et des poèmes dans plusieurs revues. Il travaille depuis plusieurs années à une édition critique du Journal de Kafka accessible en ligne (www.journalkafka.com). Dernière publication : Les Carnets du nouveau jour /3 (éditions Œuvres ouvertes)

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jeudi 28 octobre 2021

Poème express n° 888

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mercredi 27 octobre 2021

En picard : Le Rosaire

 Estrait dessacqué de 

Ch’Rosaire

par Francis Jammes

 

Par ch’tiot guerchon qui va mourir tout près de s’mère

Pindant qu’tous chés z-ot’s jon-nes i jutt’ ed’dins ch’parterre

Et par ch’l’ogeau blessé qui n’comprind pon commint

Qu’cha s’fait que s’n’aile alle saigne et pis qu’li i déchind

Par chell’ soif et chell’ faim et par ch’délire ardint

Mi, ch’vous salue Marie

 

Par tous chés goss’s chonglés par chés soulauds qui rintent

Par ch’baudet qui archut des cos d’pied dins sin vinte

Et par ch’l’humiliation d’in inochint chôlé

Par chell’ jonn’ vierch’ vindue qu’in a déshabillée

Et par ch’fi-u que s’mère alle a été traitée

Mi, ch’vous salue Marie

 

Par chell’ viell’ qui s’a inch’pée in portant du lourd

Et qu’all’ crie « Oh mon Dju ! » et par ch’pauf malheureux

Qui a jamais pu s’aqu’ter su ch’l’amour de s’z-otes

Comme el’Crox dé ch’Fi-u sur Simon ed’Cyrène

Par ch’bidet qui a queu ind’zou dech’cariot qu-i sacque

Mi, ch’vous salue Marie

 

Par chés quat’ horizons qui cruchifit’nt ch’monte

Par tous cheu-lau qu’leu chair al s’déquire ou s’in vau

Par cheux qui z’ont pu’d’pieds, par cheu qui z’ont pu d’mains

Par ch’malat’ qu’in opère et pis qui s’déclaminte

Et par ch’jusst’ ringé aveuc s-z assassineux

Mi, ch’vous salue Marie

 

Par chell’ mèr’ qu’alle apprind qu’sin guerchon i est guéri

Par ch’l’ogeau qui récap’ ch’l’ogeau qué-iu d’sin nid

Et par ch’l’herp’ qu’alle a soif et qu’chell’ pleuff’ alle arrosse

Par toutt chés baiss’s perdues, par l’amour ardonné

Et par ch’mindiant artrouvant ses pièches ed’monnaie

Mi, ch’vous salue Marie

 

Canté in français par Georges Brassens  

 traduction de Lucien Suel

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mardi 26 octobre 2021

Crabe exogène par Piotr Aakoun et Lucien Suel - 1/10

Crabe exogène. Barnabé saisit la pierre plate, et sublime discobole, réussit sept ricochets à la surface de la planète Crinoline. Le cheval basque à bascule se renverse dans le jardin d’hiver où sa crinière ocellée de taches se détache sur le fond de la haie de troènes tropicaux.

 

48 mots pour 10 dessins de Piotr Aakoun

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lundi 25 octobre 2021

Poème express n° 887

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vendredi 22 octobre 2021

Venir au vent (XI) par Laurent Margantin

Au port de santa teresa

V

 Arrivé au port de Santa Teresa

à la pointe nord de la Sardaigne

une curieuse et immense fatigue m'enveloppa

fatigue de bout du monde

 

il fait chaud dans cette chambre

un papillon de nuit est collé à la lampe du plafond

Tchouang-tseu peut-être

qui sait

tu aurais bien envie d'envoyer quelques assiettes

voltiger par la fenêtre

leurs bris continuer vos éclats de rire

présent infini de ce monde nocturne

où l'éveil est au maximum

malgré l'envie de s'allonger par terre

pour dormir et dormir encore

 

des heures à regarder les vagues

ici et ailleurs

terre emportée par leurs mouvements

que je lis même à la surface de la roche

lignes d'un monde inconnu

qui est aussi celui de l'esprit

 

où allais-tu, Pythéas?

tu ne le savais pas toi-même

il faut saisir cette musique

qui articule l'univers de nos songes

d'eux à nous continue un même rythme

très ancien et qui se renouvelle toujours

 

je lis le journal qui raconte

qu'à l'origine des temps

selon une antique légende

les Indiens Navajos abusaient du jeu

les uns voulant jouer la nuit

les autres le jour

et qu'aucun n'ayant gagné

à présent le jour alterne avec la nuit

 

eaux gonflées de la mer

et replis de la mémoire

méandres de l'esprit

 

et surgit soudain la clarté du monde

 

il fait nuit et jour

en même temps, en cet instant

obscurité et lumière se mêlent

comme sur cette côte où j'accédai

au dernier village qui s'appelait Å

grand a surmonté d'un cercle

que je dus traverser longeant un lac

et puis faisant l'ascension d'une montagne à pic

chaussé de misérables tennis

sur la crête je découvris l'autre versant

et le bout de l'île

des heures j'attendais le nuit qui ne venait pas

minuit absolument solaire

 

et ici à Santa Teresa

comme là-bas, les vagues s’éveillent

les flots se délivrent de leurs mauvais plis

éclatent contre la roche jour violent

jour clair

je ne saurai plus dormir

à force de parcourir ces côtes toujours lumineuses

je me tairai sans me taire

vous verrez mes bras se mouvoir

et parler encore malgré moi de cette aurore

un monde s'ouvrir toujours

mime de l'espace infini

embrassant le présent éclos

immense fatigue

veille sans fin

 

les vagues s'étendent et se mêlent

s'étendent et se mêlent.

 

Laurent Margantin est un auteur et traducteur vivant à la Réunion. Il a publié plusieurs récits (Aux îles Kerguelen, Le Chenil, Roman national) aux éditions Œuvres ouvertes et des poèmes dans plusieurs revues. Il travaille depuis plusieurs années à une édition critique du Journal de Kafka accessible en ligne (www.journalkafka.com). Dernière publication : Les Carnets du nouveau jour /3 (éditions Œuvres ouvertes)

 

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posted by Lucien Suel at 07:25 0 comments