vendredi 28 août 2020

Ivar Ch'Vavar : Hypnos mal au centre (5)


À la « ducasse », des torches passent dans la nuit : la
barbapapa. Il y a des lampions dans les marronniers.
Les visages suent, totalement inconnus. J’ignorais qu’il
il y eût tant d’inconnus dans mon village, en fait je
ne reconnais personne. Un grand miroir à cadre doré
est là, posé contre un tronc. J’arrive juste devant, et c’est
pour y voir, alors, un garçon à la lèvre tordue, retroussée,
avec un œil fermé ou recouvert d’une taie. Les cheveux,
noirs je crois, avalés par la nuit. Si jamais c’est moi, non,
je ne me reconnais pas. — Je regarde les gens : ils se
« démoulinent » et les clapets buccaux ont l’air de fonc
tionner rudement bien. Pourtant, je n’entends rien —
qu’une sorte de grésillement — qui a des sautes, des fois
ça crépite, ça claque quasi. Une libellule de grande taille
frôle ma pommette, deux ou trois manèges continuent de tourner. — Loin par là, il y a comme un grand flamboie
ment sur les haies, et une rumeur. Ça n’est pas tout près,
ça touche un autre canton. Les romanos montent et des
cendent sans cesse le petit escalier de leurs roulottes, ils
courent partout, ils paraissent préoccupés. Les villageois,
eux, bien aise, font de lents allers et retours, à trois ou
quatre de front, parfois bras dessus bras dessous devant
les baraques, sous les lourdes guirlandes de lampions.
à suivre...
Pages écrites courant 2003. Revues en mai 2016 et en avril 2019

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posted by Lucien Suel at 07:38