Le déambulateur
De l'autre côté du déambulateur, le monde galope, s'active, dévale, roule et pédale.
Le déambulateur, une barrière, un rempart mouvant.
Toi, tu te tiens, t'accroches des deux mains à la vie, aux chromes des barreaux, la tringle d'acier. Tu prends garde, attention de ne pas passer par-dessus bord ! Tes doigts déformés serrent fort le bastingage, exo-squelette, métal-prothèse.
Espace restreint, tu te penches un tout petit peu, toute ta vie trébuche derrière toi. Un pas encore dans le silence, dans les glissements des embouts, sur le caoutchouc, à te diriger vers ton enfance, ton innocence.
Tu as une trottinette sans roues, rien qu'un guidon, et tu as du mal, et tu respires par à coups. L'air a du mal à emplir tes poumons. Ton coeur est serré comme tes mains sur la barre du déambulateur.
La trottinette est rouge. Tu souris en la regardant. Tes verres sont embués.
On devra les frotter, les essuyer avec la peau de chamois.
Lucien Suel (extrait du livre "Une simple formalité")
Libellés : Lucien Suel
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