Claude Pélieu au Silo - III. 3.
III
DEBOUT
! TOULOUSE-LAUTREC !
par
Claude
Pélieu (1971)
3
Il
faut comprendre ceci, depuis très longtemps, le folklore de la
drogue est un cochon à bascule... le folklore des hippies en papier
est noyauté par les militants... les dés sont pipés... le folklore
des militants est une couverture... la
patrie des travailleurs,
cette révolution là on chie dessus... seuls les demeurés sont
romantiques, nous devons encore couper entre leurs
lignes-électrodes... le général Clément organise un festival de
pop-music, dur ! Extra dur !... débile !... (faites l'amour et plus
la guerre)... hou !... « jeune sous-lieutenant il approchait déjà
Eluard et Breton », vous voyez, il n'y a pas de sots métiers... «
du hash dans les poches et du vague dans les yeux »... hou !... le
consommateur consommé tâte du hash au Quartier... et les SS en
jupons libèrent le gazon et chassent le pédé...
Je
vais en rouler une autre, il faut accélérer... le ministre entre en
coup de vent...
«
Vous avez vu ça ! Hein ! Pas de sexe dans la science-fiction !...
«
Et puis ça ! Les hallucinations collectives contre ma
police !...
«
Faites publier ce communiqué »...
J'ouvre
le journal du soir... ENCORE UN JEUNE TUÉ PAR LA DROGUE !!!
triste... on a un peu pitié... pas un mot sur les prolos éclatés
au Postillon
ou au Ricard...
pas un mot sur les assassinés... rien...
«
Dis donc fiston, dit le ministre, comment es-tu devenu homosexuel
?... tu peux tout me dire, j'suis le ministre »...
Une
vieille habitude, un flash, et puis ça va ça vient, comme un bon
souvenir...
«
Quelle défonce chef ! Ça vibre sérieux ! »
Alors
l'héro dans tout ça ?
La
menace
?... flip !...
Ils
ont créé votre manque et votre maladie pour créer leur Monopole...
c'est tout... un gouffre... une douleur... le voyage au bout de
l'ennui... ils vous donneront des tickets gratuits, vous enfilerez
des perles à la poursuite de Krishna, et ils vous intoxiqueront avec
des mots... n'oubliez pas votre bagage macrobiotique, l'impérialisme
de l'estomac a pensé pour vous comme Madison Avenue... un geste
vague dans l'écho vide... les chiens de la CIA et les Vilains de
l'Espace hériteront de cette Planète...
Vos
répliques ont joué leurs dernières cartes...
Les
antennes pleurent sur les lambeaux d'ombre...
Ils
viennent de l'intérieur des technostructures, et ils vous obligent à
vous naser avec charly,
et votre joint
fume au-dessus de leur échiquier de Big Business... on en parle, à
gauche, à droite... mais je ne vous conseille pas d'en parler
publiquement, ils ont le flingue facile... et vicelards !... ce ne
sont pas des esthètes pâmés... ouais... une voix qui revient de la
vieille école.
Le
gros sac de l'overdose
éponge le silence... bruits blancs couvant dans les bars de la
ville... trafic organisé en fonction du folklore... les tentures de
l'industrie couvrent le syndicat du crime --- et dites-moi, qui,
parmi les junkies,
mis à part la guérison, va tirer son épingle du jeu ?... et cette
menace,
est-elle si importante ? si réelle ? et pourquoi ne pas distribuer
la drogue
gratuitement à tous ceux qui en ont besoin ?
Le
circuit vous arrose, vous mouille, et vous troue la peau si vous ne
vous occupez pas de vos oignons... alors personne ne parle... et
personne ne parle parce qu'il n'y a rien à dire... l'ordinateur sait
frapper à la base.
Eh
bien, les mecs, la fête est finie. N'ai pas l'impression que cette
situation pré-fasciste va s'estomper.
Vous
n'avez pas beaucoup de choix... fermer vos gueules et bosser... ou
rejoindre le Joyeux Kamp de Koncentration Psychédélique, la
Biennale de Nuremberg, ou le Club des Débiles... vous serez les
boucs émissaires du sac à pop. N'écoutez pas les menteurs, les
cons, les frustrés, les cadavres, les entrepreneurs, les
ex-machins-choses, les militants, même de très loin...
La
vérité bien placée est un jeu que la classe dominante connaît
afin de pouvoir frapper les imaginations déjà investies.
«
Un bœuf sous la plume, Mister Jones. »
Les
ministres raisonnent comme des braqueurs demeurés.
Les
trafiquants de l'Ordre font partie de l'Insect Trust.
Qui
va jouer sa vie derrière ces murs ?
L'ordinateur
grisbi
est branché sur le sac à pop, et les débiles glapissent « Power
To The People ! Free-! Freedom ! », au lieu de pister ces
trafiquants sur la bande image-son, au lieu de laisser tomber la
merde, au lieu de ne pas traiter avec les fourgueurs... vous auriez
pourtant des « preuves solides »... l'incorruptible héros ne
milite pas forcément au Secours Rouge.
Il
n'y a plus de gangsters. L'ordinateur ne peut pas être passible de
la peine de mort. Mais c'est trop profond pour l'étourdi maire
socialiste. Monsieur D. n'en sait pas assez, et comme n'importe quel
indic (ou truand) il en perd la chansonnette... l'organigramme de la
DROGUE est né dans la couleur locale.
Les
junkies
sont assis sur des strapontins de chair vive.
Les
autres toxicos branchés sur les amphettes et les barbituriques ne
sont pas beaux à voir. Et les alcooliques qui font la force de cette
nation ?... (Par comparaison, un loulou branché sur l'héro est une
rose, écrivait Alex Trocchi dans Ink,
ce mois-ci)...
Eh
bien, les mecs, c'est clair, le cut/up n'a pas encore mentionné
l'herbe qui fait les yeux émerveillés, ni les champignons sacrés,
ni le LSD... le cut/up est un sérum de vérité... coupez ! pliez !
coupez les documents top
secret
! Et vous aurez toute la vérité... les griffes biologiques des
complexes militaro-industriels meurent dans l'aube magnétique... et
le bouc émissaire est toujours un junkie,
un pédé, un gauchiste, une putain, ou quelque chose comme ça...
Un
peu de Mace, d'Omo, d'héro, quelques photos cochonnes, un ballet
bleu et du napalm, et je vous construis un monde. L'hygiène de la
vision est satisfaite. De jeunes bulles poussées en hâte éclatent
sur l'escalier de secours. Mister Big Jones pousse un bouton,
roucoule dans l'interphone, aboie un ordre incontestable, puis plonge
sa pogne velue dans le sac à pop... tout va pour le mieux dans le
meilleur des mondes.
Libellés : Livre de Claude Pélieu, Pélieu
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