Claude Pélieu au Silo - VII.1.
VII
J'AI
PASSÉ PAR LÀ POUR VENIR ICI
par
Claude Pélieu
1
Amphétamine Cow-Boy
en direct de la rue Sans Nom... Londres, 1971, série noire
surréaliste dans le ghetto des mots et des idées... ombres grasses
au-dessus des banlieues lépreuses... 1971, vous vous souvenez de ces
photos - vous étiez scandalisés, émus, indifférents - vous
n'étiez pas des barbares, comme ces jeunes soldats, comme Charles
Manson - vos idées étaient bien à vous, donc vagues... et je
disais qu'il n'y aurait jamais assez de violence, je n'aime pas la
violence... Depuis j'ai brûlé ce que j'aimais, et j'aime ce que
j'ai brûlé. Tout au long de la route, encore une fois, je vous
raconte, vite, en gris, en noir, en couleur, comme ça, à
l'emporte-mot, avec ma bombe tue-temps, mon herbe bleue, et tout -
moi aussi je me suis trompé, je comptais intercepter quelque chose,
le réel-surréel, quelque chose saisi au vol, en plein ciel, en
chute libre, en haute mer, n'importe où - Prose-poursuite dans les
rues du monde, karaté mental... pirouettes ! merveilles ! fêtes !
magie noire et blanche ! festivals de vie !.. je me souviens des
mômes-pivoines et de leurs jeans tachés de foutre, des anges de
l'enfer, des filles-fleurs aux yeux de ciel, tous défoncés,
planants, comme on disait en ce temps-là... Bien sûr il y a eu des
hauts et des bas, des conséquences, des effets désastreux, des
accidents, et des rumeurs...
« De nos jours,
fiston, il faut faire vite », avait coutume de dire Jimmy
Cul-de-Poisson, appuyant sur l'accélérateur, feuilletant
distraitement son dictionnaire surréaliste, avec quelle grâce !...
toujours sur le ballasta!... Je comptais établir cette carte du
cerveau, à travers une chaîne ininterrompue de poèmes, de cantos,
de scripts, de collages, de bribes, de photos, de films,
d'enregistrements, d'informations, et de visions, vite, brutalement,
avec arrogance... Images uniques jaillissant de la nuit américaine,
images sans cesse décodées, effacées, images-actions de l'absence,
de la colère, de l'exil, de l'oubli, de la mort sans phrase, et
surtout les images de la vie qui murmuraient gravement : CHANGER OU
DISPARAÎTRE.
Libellés : Livre de Claude Pélieu, Pélieu
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