Sans espoir de retour du courrier 3/5
« Sans
espoir de retour du courrier », cette correspondance entre
Alban Michel et Lucien Suel a été publiée en 1986 (30 ans déjà!)
dans le n° 4 de la revue Après la
plage.
Nous
le faisons paraître ici en 5 épisodes. Il est question de plage, de
jazz, de roman noir et d'Audrey Hepburn.
Biscarosse, le 20 juillet
Mon vieux Lucien,
Tu te plantes avec ton jazz. Je n'y connais
rien. J'ai longtemps rangé le saxophone
dans la famille des cuivres. Du moment que c'est triste je suis
content ; je titube sur la plage.
Mes gueules de bois ont déjà
entendu meugler un sax mais elles ne savent plus dans quel bar. C'est
ça, moque-toi de mes mortifications, tu me fais marrer avec tes
balades solitaires sur la plage. Ne me dis pas que tu trouves ça
beau une plage. West Coast mon cul.
Je vois d'ici le tableau. Il manque juste un
sax, un piano, et pour me faire plaisir, une caisse claire balayée
par Al Seamless. Tu veux que je t'écrive les paroles ?
Je peux juste te taper une ou deux ballades. Je
suis plutôt pilleur d'épaves que
marin. Dénicher une fille dans un pull en shetland rosé ça je ne
sais pas faire. Trouve-toi quelqu'un d'autre à qui écrire. Tout ce
que je connais du jazz c'est Elmore James.
Trouve-toi une fortification abandonnée
pour y brûler à l'abri du
vent tout ce que je t'ai pillé.
Fais ça devant la fille si ça peut te soulager. De l'hôtel je vois
le chemin de croix des marchands de sable. Les habitués du
blockhaus. « Ça serait pas merveilleux si on pouvait rester ici ?
».
Alban
Sans espoir de retour du courrier : Lettre 1
Sans espoir de retour du courrier : Lettre2
Libellés : Alban Michel, Archives, Correspondance, Lucien Suel, Sans espoir de retour du courrier
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