Interview Lucien Suel (7)
Lucien Suel interviewé par Nicolas Tardy (7/7) avril 2003Vient de paraître "ROUTINES" par Nicolas Tardy aux éditions de l'Attente à Bordeaux.
Comment vois-tu le paysage poétique français et international ? Comment tu te sens par rapport à cela ? J'ai une position un peu spéciale, étant donné que je n'ai jamais voulu me priver de quoi que ce soit, je circule dans des réseaux tout à fait différents et j'y suis à l'aise. Je suis quand même plus à l'aise dans ce qu'on pourrait appeler le réseau poésie-sonore/poésie-performance, c'est vrai. Mais je suis amené à rencontrer d'autres types d'écritures ou à participer à d'autres types de lectures poétiques.
Par rapport aux revues, aux nouvelles revues ? Par rapport au moment où toi tu t'es mis à faire des revues ? Quand j'ai fait mes revues de poésie c'étaient des trucs très simples, ça a toujours été des projets où il n'y avait que moi qui étais impliqué. J'étais responsable de tout, je faisais tout du début à la fin. Ça c'est pareil que pour ma maison, je fais le travail tout seul. Ça veut pas dire que j'ai pas de rapports avec les gens, mais je préfère maîtriser du début à la fin. J'ai peur de pas connaître toutes les revues, mais, en gros, je préfère toujours les revues qui sont faites par des poètes, plutôt que des revues de type universitaire où je peux trop sentir la théorie derrière, et la théorie qui vient avant le travail. Je préfère les revues qui sont faites par des individus (ou des groupes) qui ont un projet poétique. J'aime pas trop non plus ce qui se prend trop au sérieux ou ce qui veut changer le monde, c'est tout à fait illusoire. J'aime bien les choses qui sont faites avec sincérité, qui sont drôles, qui ne sont pas que graves. J'ai collaboré régulièrement avec Le jardin ouvrier depuis le début, du n°1 au n° 39, mais je m'intéresse à toutes sortes de revues, que ce soit Le Petit Véhicule ou Contre-allées poétiques ou bien la revue Doc(k)s ou Boxon, des revues complètement différentes mais elles reconstituent dans ma boîte aux lettres les rencontres que je fais quand je me balade que je rencontre des poètes différents et que je participe à des lectures où on n'imaginait pas se retrouver ensemble. Je suis pour le grand mixage, c'est le côté collage. Pourquoi on pourrait pas entendre un poète lyrique et tout de suite après passer à une performance complètement déjantée ? J'aime bien cette idée-là. Pour moi ce qui compte c'est la sincérité des gens. Ce que je n'aime pas c'est la pose, c'est les poseurs. Ils sont chiants la plupart du temps.
Photocopie ? Ah l'invention géniale ! Quand je pense que j'étais obligé pour Starscrewer de graver des stencils ! L'offset c'était bien, mais les machines coûtaient tellement cher qu'il fallait se débrouiller. Alors après quand il y a eu la photocopie c'était parfait parce que là vraiment tout le monde pouvait faire une revue, tout le monde pouvait publier. C'est vraiment génial parce qu'avec la photocopie plus l'ordinateur, avec la possibilité de faire ses maquettes soi-même à la maison, éditer une revue maintenant ça ne pose plus trop de problèmes, y a pas d'excuses, c'est vraiment démocratique.
Est-ce-que les poètes surréalistes belges (Scutenaire, Mariën... ) ont ou avaient eu une influence sur ton travail ? Non pas spécialement, plutôt les gens de Cobra qui étaient en Belgique, les peintres.
Le côté brut ? Oui, néo-expressionniste et aussi parce que c'étaient des peintres qui étaient poètes la plupart du temps. Il y a souvent de l'écriture dans leurs tableaux. En fait la première fois que je suis allé à Bruxelles visiter les Musées Royaux j'ai été voir les primitifs flamands et Cobra. Sinon, en Belgique, ce qu'il y a de bien c'est la bière [Rires].
Ta devise ? C'est pas vraiment une devise, mais j'ai 4 mots qui me guident pas mal, c'est : mémoire, résistance, vision, humour.
How do you see the French and International poetry landscape? How do you feel yourself confronting all this? I've got a special position because I never wanted to choose one special way of doing. I circulate through many different networks and I feel at ease with them all. Of course, I'm more involved in what you may call sound poetry or performance poetry. That's true. But I often meet other types of poetry, other types of writing.
And what about the poetry magazines, new ones? The difference when you started to create small mags? When I was printing my poetry mags, they were very simple productions. I was the only person involved in the making of them. I made the whole thing alone from the beginning to the end. It was the same here in the building of my house. That doesn't mean I've got no relationships with other people, but I feel better when I manage it my way. I'm afraid I don't know every poetry mag, but in a general way, I prefer reviews that are run by poets, more than the university style where you can smell that strong theoretical perfume, theory coming before work. I prefer reviews that are made by individuals or groups who have a real poetic purpose. On the other hand, I don't like those who are taking it too seriously or those pretending to change the world, which is quite illusive. I agree when things are done sincerely and with a sense of humor. I collaborated on a regular base with Le Jardin Ouvrier from the beginning (from #1 to #39), but I've got a general interest in different kinds of reviews, Le Petit Véhicule, or Contre-Allées Poétiques, or Doc(k)s or Boxon, totally different magazines but all together restoring in my letter box the meetings I’ve made during my peregrinations, meeting different poets, participating in collective readings where you don't expect to meet up... I long for that big mixing, the collage thing. Why would it be impossible to listen to a lyrical poet and just after watch a totally crazy performance? I like this idea. What is really important is people's frankness. I don't like poseurs. They're often boring.
Photocopying? Oh, what a wonderful device! When I think of what I was obliged to do, to get my Starscrewer properly printed! Electronic stencils to engrave! Offset was nice, but the machine cost a lot. You had to make do... So, after all this, photocopying is perfect. Now, everybody can make their own mags, everybody can publish. That's great because with copiers and personal computers, you can do the layout yourself. To publish poetry now is not a problem any more. No excuses for not doing it, it's really democratic.
Did the Belgian surrealist poets (Scutenaire, Mariën...) have an influence on your work? Not really, it was more the Cobra people who lived in Belgium, the painters.
The raw side? Yes, neo-expressionnists, and those painters were mostly poets too. Very often you can find writings in their paintings. Actually when I first went to Brussels to visit the Royal Museums, I looked at the Flemish Primitives and at Cobra. And what is very nice too, in Belgium, is the beer.
Your motto? It's not really a motto but I've got 4 words which are a sort of guideline: memory, resistance, vision, humor.
Comment vois-tu le paysage poétique français et international ? Comment tu te sens par rapport à cela ? J'ai une position un peu spéciale, étant donné que je n'ai jamais voulu me priver de quoi que ce soit, je circule dans des réseaux tout à fait différents et j'y suis à l'aise. Je suis quand même plus à l'aise dans ce qu'on pourrait appeler le réseau poésie-sonore/poésie-performance, c'est vrai. Mais je suis amené à rencontrer d'autres types d'écritures ou à participer à d'autres types de lectures poétiques.
Par rapport aux revues, aux nouvelles revues ? Par rapport au moment où toi tu t'es mis à faire des revues ? Quand j'ai fait mes revues de poésie c'étaient des trucs très simples, ça a toujours été des projets où il n'y avait que moi qui étais impliqué. J'étais responsable de tout, je faisais tout du début à la fin. Ça c'est pareil que pour ma maison, je fais le travail tout seul. Ça veut pas dire que j'ai pas de rapports avec les gens, mais je préfère maîtriser du début à la fin. J'ai peur de pas connaître toutes les revues, mais, en gros, je préfère toujours les revues qui sont faites par des poètes, plutôt que des revues de type universitaire où je peux trop sentir la théorie derrière, et la théorie qui vient avant le travail. Je préfère les revues qui sont faites par des individus (ou des groupes) qui ont un projet poétique. J'aime pas trop non plus ce qui se prend trop au sérieux ou ce qui veut changer le monde, c'est tout à fait illusoire. J'aime bien les choses qui sont faites avec sincérité, qui sont drôles, qui ne sont pas que graves. J'ai collaboré régulièrement avec Le jardin ouvrier depuis le début, du n°1 au n° 39, mais je m'intéresse à toutes sortes de revues, que ce soit Le Petit Véhicule ou Contre-allées poétiques ou bien la revue Doc(k)s ou Boxon, des revues complètement différentes mais elles reconstituent dans ma boîte aux lettres les rencontres que je fais quand je me balade que je rencontre des poètes différents et que je participe à des lectures où on n'imaginait pas se retrouver ensemble. Je suis pour le grand mixage, c'est le côté collage. Pourquoi on pourrait pas entendre un poète lyrique et tout de suite après passer à une performance complètement déjantée ? J'aime bien cette idée-là. Pour moi ce qui compte c'est la sincérité des gens. Ce que je n'aime pas c'est la pose, c'est les poseurs. Ils sont chiants la plupart du temps.
Photocopie ? Ah l'invention géniale ! Quand je pense que j'étais obligé pour Starscrewer de graver des stencils ! L'offset c'était bien, mais les machines coûtaient tellement cher qu'il fallait se débrouiller. Alors après quand il y a eu la photocopie c'était parfait parce que là vraiment tout le monde pouvait faire une revue, tout le monde pouvait publier. C'est vraiment génial parce qu'avec la photocopie plus l'ordinateur, avec la possibilité de faire ses maquettes soi-même à la maison, éditer une revue maintenant ça ne pose plus trop de problèmes, y a pas d'excuses, c'est vraiment démocratique.
Est-ce-que les poètes surréalistes belges (Scutenaire, Mariën... ) ont ou avaient eu une influence sur ton travail ? Non pas spécialement, plutôt les gens de Cobra qui étaient en Belgique, les peintres.
Le côté brut ? Oui, néo-expressionniste et aussi parce que c'étaient des peintres qui étaient poètes la plupart du temps. Il y a souvent de l'écriture dans leurs tableaux. En fait la première fois que je suis allé à Bruxelles visiter les Musées Royaux j'ai été voir les primitifs flamands et Cobra. Sinon, en Belgique, ce qu'il y a de bien c'est la bière [Rires].
Ta devise ? C'est pas vraiment une devise, mais j'ai 4 mots qui me guident pas mal, c'est : mémoire, résistance, vision, humour.
How do you see the French and International poetry landscape? How do you feel yourself confronting all this? I've got a special position because I never wanted to choose one special way of doing. I circulate through many different networks and I feel at ease with them all. Of course, I'm more involved in what you may call sound poetry or performance poetry. That's true. But I often meet other types of poetry, other types of writing.
And what about the poetry magazines, new ones? The difference when you started to create small mags? When I was printing my poetry mags, they were very simple productions. I was the only person involved in the making of them. I made the whole thing alone from the beginning to the end. It was the same here in the building of my house. That doesn't mean I've got no relationships with other people, but I feel better when I manage it my way. I'm afraid I don't know every poetry mag, but in a general way, I prefer reviews that are run by poets, more than the university style where you can smell that strong theoretical perfume, theory coming before work. I prefer reviews that are made by individuals or groups who have a real poetic purpose. On the other hand, I don't like those who are taking it too seriously or those pretending to change the world, which is quite illusive. I agree when things are done sincerely and with a sense of humor. I collaborated on a regular base with Le Jardin Ouvrier from the beginning (from #1 to #39), but I've got a general interest in different kinds of reviews, Le Petit Véhicule, or Contre-Allées Poétiques, or Doc(k)s or Boxon, totally different magazines but all together restoring in my letter box the meetings I’ve made during my peregrinations, meeting different poets, participating in collective readings where you don't expect to meet up... I long for that big mixing, the collage thing. Why would it be impossible to listen to a lyrical poet and just after watch a totally crazy performance? I like this idea. What is really important is people's frankness. I don't like poseurs. They're often boring.
Photocopying? Oh, what a wonderful device! When I think of what I was obliged to do, to get my Starscrewer properly printed! Electronic stencils to engrave! Offset was nice, but the machine cost a lot. You had to make do... So, after all this, photocopying is perfect. Now, everybody can make their own mags, everybody can publish. That's great because with copiers and personal computers, you can do the layout yourself. To publish poetry now is not a problem any more. No excuses for not doing it, it's really democratic.
Did the Belgian surrealist poets (Scutenaire, Mariën...) have an influence on your work? Not really, it was more the Cobra people who lived in Belgium, the painters.
The raw side? Yes, neo-expressionnists, and those painters were mostly poets too. Very often you can find writings in their paintings. Actually when I first went to Brussels to visit the Royal Museums, I looked at the Flemish Primitives and at Cobra. And what is very nice too, in Belgium, is the beer.
Your motto? It's not really a motto but I've got 4 words which are a sort of guideline: memory, resistance, vision, humor.
Libellés : Interview français-anglais, Lucien Suel, Traduction
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