jeudi 16 août 2012

MINUTES DE SAMPLE MÉMORIAL (3/3)

Ces « MINUTES DE SAMPLE MÉMORIAL » sont le résultat d’un cut-up réalisé à partir de deux textes originaux : « Lieds funèbres », au début des « MINUTES DE SABLE MÉMORIAL », premier livre publié d’Alfred Jarry, et les premières pages du « FESTIN NU », en anglais « NAKED LUNCH », le plus célèbre roman de William Burroughs, inventeur du cut-up.
Outre le fait que ces deux écrivains ont exercé sur nous une forte influence, nous avons noté d’autres convergences entre eux. William Burroughs, décédé en 1997, partageait avec Alfred Jarry une même misogynie, et comme lui, éprouvait un attrait certain pour les opiacés. Nous ne savons pas si le Docteur Benway, personnage très ubuesque du Festin nu, aurait sympathisé avec le Docteur Faustroll, mais nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que le premier volume collectif consacré au cut-up et qui réunissait des textes composés par Burroughs et ses amis fut publié en 1960 à Paris sous ce titre : « MINUTES TO GO »...


III

L’incube a rampé comme une limace. Sacheton d’herbe (c’est lui qui s’appelle absinthe). Fenêtre, lève ta grande herbe, pauvre cloche, grince ta grimace comme une grosse griffe ! (N.B. : L’herbe-aux-chats l’a vomi ainsi qu’une lourde vague qui a le même goût que la marijuana.) La vitre frémit et son œil s’effare à leurs dépens aux flots d’huile fauve.

Je me souviens du temps où couche et déchire un vent de rafale. Le fond de la terre le tient. Faux poulet. C’était à Chicago, porche triomphal. Le Milicien s’amène au boulot en bras toujours hauts. Il ne peut claquer l’insigne de shérif bidon et un lasso à dents de pendus. « Battez la semelle, blindé ou quoi ? » Et lui le tient par les pieds. Western : « Dégaine, l’ami ! »

Sur quoi ramper comme un lierre, grimper comme à travers le parc avec le plomb de la terre qui me tient par les pieds. Nabot avant de se faire épingler voudrait les ailes des chauves-souris. Il n’avait pas volé son nom... Mes pieds sont des goules au col des pédés. Comme mettre dans l’œuf le sang des morts. Mon corps est une outre.

Oui, et vise le Môme parégorique.
Oui, et File-Vinaigre ne perd pas tes yeux.

Mes yeux sont des magasins de chaussures de pierres qui, philosophales, versent du rabiot. Tout ce qui me touche se transmute. Ses lèvres virent au violet — il a l’air fixé éternellement, marche sur son client à tout petits pas, le tient par les pieds, et se met à le palper avec ses doigts de pendu. Ainsi se lamente Le Glaiseux au regard de chant de cigale...
« Garde tes trésors, je viens, petit Homme, délivrer tes pieds. Et voici ma main qui cherche tes frais péchés à bout de bras. »

Il est blême... mais sa main de gloire, en michetons qu’il arnaque, emporte son ricanement... De vouloir lui faire la peau, l’incube cagade et le résultat n’est pas beau. Vogue dans la coupe aux flots d’huile d’hôpital. Le pauvre Glaiseux en perd huile fauve, frémit dans la coupe aux couloirs de métro et les self-services en lampe d’un mort.

Les Anges entre les capotes et les écorces d’orange. Il dort, et son corps, son corps d’émail finit dans le silence calme, dans le grand lit sombre. Vogue en carcans de béton. Veilleuse, répand ta lumière douce, pour piper les vicieux de la balistique. Écoutez, la Nuit froisse son manteau. Rideaux inquiets, ébouriffez vite vos héros de feuilleton, c’est Veilleuse mourante, sombre, ce qui permet de soulager. La nuit est tombée comme une pluie rendez-vous. Vitre, épand des pleurs, pleurs amers comme ça tout en disant : « Ah, Croix sainte, je m’en vais te servir de l’herbe. »

Être horrible et vague, la nuit en fureur séchée et roulée comme une cigarette, glisse et déferle aux dalles d’un phare et les distraits l’apprennent souvent. Veilleuse mourante, sombre. L’enfant dort. Son corps, son corps tapotant l’avant-bras, le devoir appelle. Très calme dans le grand lit sombre. « Faut être juste, ou bien répand ta lumière lourde sur Bill Gains, tout recroquevillé. »

La vitre se crève, cerceau de papier. Banque début de siècle. Frémis dans la coupe, veilleuse de graisse par-dessus la crasse. Les ténèbres sont un filet de mou pour quatre clients que j’avais en banlieue. Pointe claire accroche des larves. Compte du temps de l’opium : Fantômes Anges qui veillent éclairés d’étoiles, balayant des corridors poussiéreux, crachant dans l’aube malade de la came dans des garnis pour ratés.

Lucien Suel (with a little help from Alfred Jarry & William Burroughs)

"Minutes de sample mémorial" est un extrait de "DÉJÀ VU, DÉJÀ LU, DÉJÀ RI", hommaRge à Jarry, édité par les éditions Cynthia 3000 dans l'ensemble Omajajari, pour le centenaire de la mort d'Alfred Jarry en 2007.

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posted by Lucien Suel at 07:32

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

J'adore lire ces textes étonnants de sens qui se butent à nos murs et rebutent au sens commun tout en demeurant si fluides.

Ils me font penser à l'un de mes textes préférés, La cimaise et la fraction, dont l'arrière sens reste omniprésent malgré le S + 7 lescurien et que je m'amuse assez souvent à déclamer sur le ton de l'autre.

Et que les sources soient citées avec la petite histoire est totalement pertinent, à mon sens.

Zéo Zigzags

09:23  

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